IFE Italia

De femme de carriere a refugeè

traduzione a cura di Christine Beer Concha
mercoledì 16 marzo 2016

JE NE JAMAIS PENSÈ A MOI EN TANT QUE PERSONNE REFUGÈE

J’habitais dans une jolie partie d’Alep, et j’ai passé la période de mes 20 ans à étudier les sciences humaines, à voyager et à travailler en tant qu’ingénieur civil pour le gouvernement. J’ai rencontré mon mari il y a 6 ans, alors âgée de 34 ans. Il était médecin. Quand on me l’a présenté, je n’ai pas été plus impressionnée que ça par lui. Il a demandé à m’épouser presque immédiatement. Je pense que je savais intérieurement que c’était LUI. Nous étions inséparables. Notre maison était belle et ancienne, avec de hauts et grands plafonds, des murs blancs et des sols carrelés. Nous passions nos journées au travail et nos soirées avec les amis à manger dehors, écoutant de la musique, vivant une vie normale.

Au départ, je n’ai pas pris peur quand les choses ont commencé à changer. Je ne pensais pas que cela m’affecterait. Mais après des mois de lutte des soldats rebelles contre le régime du Président Bachar El-Assad, les bombes ont commencé à tomber. Des groupes différents ont commencé à s’attaquer, et Daech a également commencé à prendre le contrôle du pays. Je suis palestinienne, mais la guerre à Gaza n’était «rien» en comparaison. Il n’y avait pas d’eau courante, pas d’électricité. Des règles strictes ont commencé à être appliquées dans certains domaines, nous interdisant de conserver des photos dans nos téléphones, d’utiliser des produits américains, de sortir une fois la nuit tombée. Si vous désobéissiez, vous disparaissiez. Nous avons donc arrêté de quitter la maison la nuit tombée et de voir nos amis. J’écoutais les bombes exploser la nuit couchée dans mon lit, en me demandant si nous allions survivre.

J’ai continué à aller au travail, mais il n’y avait rien à faire. A part la guerre, tout s’était arrêté. Si vous marchiez dans la rue, vous ne voyiez personne. Tout le monde était hors de vue, caché dans des chambres à l’arrière de maisons sans toits, derrière des murs qui avaient été détruits. Quand j’ai donné naissance à ma première fille, Sham, ma famille n’a pas pu traverser le pays pour venir la rencontrer, pendant plus d’une année. J’étais juste enceinte de quelques mois de mon deuxième enfant, Bisan, quand ils ont commencé à bombarder la rue où nous vivions. Avec Sham dans mes bras, j’ai attrapé un sac et mon passeport, et je me suis enfuie. Nous avons loué une autre maison, dans une partie supposée plus sûre de la ville. Mais la nourriture à commencer à manquer, et nous nous sommes retrouvés à manger du riz sec à chaque repas. Mais c’était le moindre de mes soucis.

Ce n’est qu’en avril de cette année, quand je suis tombée enceinte pour la troisième fois, que j’ai fini par accepter que nous devions nous en aller. Je n’avais pas prévu d’avoir un autre enfant au départ, et je souhaitais presque le perdre, plutôt que de grandir dans un pays rempli de peur.

Sham et Bisan ne pouvaient pas aller à la garderie, et il était envisageable qu’elles ne puissent aller à l’école. Mon mari ne voulait pas venir avec nous. En tant que médecin, il pensait qu’on avait besoin de lui là-bas. Durant 5 mois, nous nous disputions tous les jours. Mais à la fin, il nous a laissés partir. La dernière chose qu’il m’a dite était que je devais faire en sorte de me mettre en sécurité avec les enfants, car nous étions toute sa vie. Il m’a dit que si je ne le faisais pas, cette douleur n’en vaudrait pas la peine.

DIRE AU REVOIR

Vous pensez que vous avez besoin de valises pour traverser le monde, mais quand cela vous arrive, vous avez juste besoin de vous-même. Et si vous avez suffisamment d’économies, les gens vous amèneront partout, même au travers des frontières.

J’ai plastifié nos certificats de naissance et mon diplôme, j’ai préparé un sac de médicaments, de pansements, ainsi que des habits de rechange pour nos filles. Je suis musulmane, mais je ne porte pas le voile sur la tête. Je me suis donc vêtue d’un niqab qui couvrait ma tête, ma gorge et mon corps pour éviter d’attirer l’attention. J’ai emballé mon passeport dans du papier film, que j’ai ensuite attaché autour de mon ventre. Et ainsi, un matin tôt en septembre, j’ai dit aurevoir à mon mari et je suis sortie de la ville. Ensemble, nous avons marché et marché encore. Je portais Bisan, et Sham tenait le rythme à côté de moi. Quand elle était fatiguée, je lui disais que le bébé que je portais dans mon ventre était lui aussi fatigué, et que c’était pour cela que je ne pouvais pas la porter. La nuit, des passeurs nous proposaient une chambre avec environ 20 autres personnes. Puis nous avons continué à marcher. Quand nous nous sommes approchés de la Turquie, nous avons payé un conducteur pour nous faire passer la frontière. Nous avons passé 4 heures cachés à l’arrière de son véhicule car nous traversions des checkpoints, avant de prendre un bus pour 14 heures en direction d’Izmir, une ville côtière. A deux heures du matin, nous trouvions un hôtel, et nous avons passé trois jours à nous y cacher. Nous ne sommes sorties sous aucun prétexte, ni pour de la nourriture, ni pour prendre l’air. Nous ne voulions pas prendre le risque d’être attrapées et renvoyées au pays.

Finalement, un autre passeur est venu me dire qu’il nous emmènerait toutes trois en Europe pour £ 1’500. Il nous a mis dans l’arrière de son van avec 30 autres personnes environ, et personne ne savait où nous allions. Plus tard, ils nous ont crié de sortir, et nous ont fait marcher durant des heures à travers une forêt. C’était tôt le matin quand nous nous sommes arrêtés dans une clairière. Partout où vous regardiez, il y avait des détritus : des bouteilles vides, des canettes, des emballages, des tas de vieux morceaux de nourriture, sur plusieurs «pouces» de profondeur. On nous a fait nous asseoir et attendre. Il n’y avait pas d’ombre, et nulle part ailleurs où aller. De plus en plus de personnes arrivaient, et la chaleur du soleil nous brûlait le visage. Je n’avais qu’une bouteille d’eau, et j’avais peur d’en venir à cours. Je l’utilisais juste pour humidifier les lèvres de Sham et Bisan lorsqu’elles se mettaient à pleurer.

C’est le soir que les hommes sont revenus et nous ont emmenés à notre bateau. Le canot montait et descendait, menaçant de chavirer et de nous jeter tous à l’eau. Je me sentais nauséeuse alors que je portais Sham et Bisan. Nous étions plus de 50 à être entassés, tout était mouillé, et je ne pouvais bouger ni les bras ni les jambes. Même les gilets de sauvetage ne nous rassuraient que peu. Si vous ne savez pas nager, vous n‘avez aucune chance. Quand nous avons atteints la rive nord de Lesbos en Grèce, je ne pouvais pas parler. J’ai juste pressé mes filles contre moi et me suis mise à pleurer.

A TRAVERS L’EUROPE

C’était la nuit quand nous avons atteint Kara Tepe, le camp principal dans le sud de l’île. Nous n’étions pas autorisés à prendre des taxis ou à séjourner à l’hôtel, bien qu’ils furent vides, et j’avais pourtant de l’argent. Utilisant la lumière d’un téléphone, nous trébuchions contre les tentes dans l’obscurité. Des cailloux pointus transperçaient la bâche recouvrant le sol, et des boîtes en carton aplaties nous servaient de lits. En arabe, quelqu’un avait écrit une prière à Allah avec un feutre. Nos habits étaient encore mouillés de la traversée en mer, et nous n’avions pas de quoi nous changer. Sham et Bisan dormaient, mais je suis restée couchée des heures, tremblant de froid et effrayée.

Le matin, le camp était rempli. Deux milles personnes étaient arrivées durant la nuit, l’air était épais, d’odeurs d’ammoniac, de mouches. Je ne savais pas où aller, à qui parler, comment les choses fonctionnaient, alors je restais assise dans la tente, attendant que nos affaires sèchent. Des hauts -parleurs nous disaient de faire la queue pour nous enregistrer, et la police anti-émeute tapait du pied sur le sol. J’ai emprunté des vêtements pour Sham à une famille voisine et je l’ai amenée aux toilettes, mais un homme l’a poussée et elle est tombée dans la boue sale et puante. Des larmes ont rempli mes yeux, et elle a pressé ma main. « Ne pleure pas», me disait-elle, et bien sûr, je pleurais encore plus.

Après l’enregistrement, j’ai réservé des tickets pour voyager jusqu’à Kavala. Durant 9 heures, nous sommes restées assises dans un bateau, pendant que des hommes grecs me regardaient et murmuraient entre eux. Bisan et Sham, alternativement, se querellaient et dormaient. Les 1’500 kms suivants passèrent en un clin d’oeil. Train après train, bus après bus. Tessaloniki, Idomeni, Gevgelija, Slanishte, Preevo, Belgrade, Kanjia, Horgo, Röszke, Hegyeshalom, Nikelsdord. Un pied devant l’autre, un pas à la fois. Yazan, un jeune de 19 ans de Damas, m’a vue lutter, et a mis Sham sur ses épaules pendant que je portais Bisan. En Serbie, la mafia était partout, essayant de se faire de l’argent sur notre lutte. Ils mettent en place leurs propres bus et font payer le double du prix officiel. En Hongrie, nous avons eu de la chance car la frontière n’avait pas été fermée, mais nous avons passé deux heures enfermés dans un train stationnaire. Au moment d’arriver à Vienne, j’avais à peine dormi durant trois jours Mon dos me faisait mal, mon ventre était douloureux, tout semblait couvert de sueur et de poussière. Nous avons fait 6 heures de queue pour acheter les billets en direction de Munich. Bisan pleurait pendant que Sham était assise, silencieuse dans des bras étrangers. Cette nuit là, j’ai trouvé un appartement. J’ai contacté mon mari par Whatsapp depuis ma chambre. J’avais un petit flacon roll-on contenant son aftershave, que je tenais près de mon nez pour dormir.

Le jour suivant, nous prenions le train. Je regardais les champs verts par la fenêtre. A Salzbourg, le train s’est arrêté, et des policiers nous ont crié de débarquer. A moins de venir de la communauté européenne, vous ne pouviez pas passer. Un conducteur de taxi arabe a pris pitié de nous, et nous a expliqué comment rejoindre l’Allemagne à pied. Nous avons pris un bus jusqu’à un village proche de la frontière, puis nous avons marché au-delà des montagnes. Je ne m’étais jamais souciée d’arriver en Allemagne avant, je voulais juste rejoindre un endroit en sécurité. Quand nous avons passé le panneau de signalisation indiquant la République fédérale d’Allemagne, j’avais presque baissé ma garde.

LE FUTUR

Mais bien sûr, cela n’était pas le cas. La police n’a pris que 55 minutes pour arriver. Ils nous ont repérés en train d’attendre au bord de la route, et ont pu déduire de par nos sacs, nos vêtements et notre peau que nous étions entrés illégalement dans le pays. On nous a mis à l’arrière d’un fourgon de police, et on nous a conduit à un commissariat près de Freilassing. Pendant trois heures, un traducteur nous a questionnés. Comment avions-nous appris comment entrer en Allemagne ? Avait-on payer quelqu’un pour nous y amener ? Où voulions-nous aller ?

A onze heures du soir, ils nous ont dit que nous pouvions nous rendre à la gare, si on payait £ 50 pour un taxi. On nous a donné différents bracelets colorés, de ceux qu’on reçoit lorsqu’on se rend à un festival ou à une soirée, et à minuit, notre groupe partait pour Munich. Durant le voyage, Sham a eu un cauchemar, est s’est réveillée en criant.

Je ne sais pas ce que j’attendais quand je suis arrivée à Munich. Je voulais simplement l’endroit le plus sûr auquel je pouvais penser, où nous pourrions attendre avant de retourner en Syrie quand la guerre prendrait fin. Chaque personne que je connais souhaite rentrer au pays. Je pensais que je serais capable de faire des amis en Allemagne, ou de commencer à apprendre la langue. Mais durant notre première nuit, nous avons du dormir sur un banc, et la suivante, nous avons été amenés dans de vieux baraquements de l’armée. Ensuite, mon passeport a été confisqué, et jusqu’à maintenant, personne ne m’a dit quand je le récupérerai. Il fait froid ici, et nous avons tous la grippe, mais il n’y a aucun médicament. J’ai peur d’être oubliée, et parfois, je me sens très seule. C’est difficile de ne pas pleurer tout le temps.

Je sais que nous sommes en sécurité, et que nous avons de la chance, cela veut tout dire. Mais je commence à réaliser qu’arriver en Europe n’est pas la fin de nos problèmes. Atteindre l’Europe n’en était que le début.

Retrouvez l’article original tiré de Marie-Claire


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